Témoignage
Il y a moins d’une semaine, Masami Le Vot-Sugawara, 45 ans, prof de japonais à l’Enssat, rentrait de Sendai. Comme tous les étés, elle est allée voir sa famille au Japon. Sauf que cette année, elle a retrouvé une ville qui se relève tant bien que mal de ses plaies causées par le séisme et le tsunami de mars. « Ca fait bizarre, c’est un mélange de zones sinistrées et d’autres où la vie a repris. L’aéroport étant fermé, je suis arrivée à la gare. J’ai vu le plafond défoncé. Durant le trajet, de nuit, jusqu’à la maison de mes parents, je n’ai pas vu grand chose. »
Bâtiments effondrés
Le lendemain et les jours suivants, elle voit de ses propres yeux « le quartier proche de la plage où il ne reste plus que des fondations de maisons. Quelques personnes y errent encore, cherchant des souvenirs, des objets… » Dans le quartier de ses oncles et tantes, « des bâtiments effondrés ». Des lotissements en reconstruction où certains habitants arriveront à retrouver leurs voisins « car on évite de séparer les gens ». Et la maison de ses parents qui a tenu bon.
« L’eau du tsunami est arrivée à 700 m de chez eux. Une grande route a fait l’effet d’une digue et a stoppé la progression. Par rapport au séisme, la maison était prévue pour. Mon père est architecte… glisse Masami. Mes parents ont quand même senti, sur le coup, que le séisme était bien pire que d’habitude. Ils n’ont pas pu tenir debout. »
Fête des étoiles
Si en 2 mn en voiture, « je pouvais voir des carcasses de voitures abandonnées et des arbres au sol », dans le centre de la grande ville (1 million d’habitants), la vie suit son cours. « Beaucoup de magasins ont rouvert. » Les gens, cependant, Masami les trouve « changés. Ils pensent davantage à ce qui est fondamental. Beaucoup sont déçus du gouvernement et plus méfiants qu’avant, surtout par rapport aux infos sur la radioactivité. » Pourtant les taux n’y sont pas actuellement alarmants comme à Fukushima. « C’est terrible pour les réfugiés de Fukushima parce que parfois, rien que de voir une voiture immatriculée à Fukushima, cela fait peur à certains ! »
Durant son séjour d’un mois en compagnie de ses deux filles, Masami a pris part à Tanabata Matsuri, la « Fête des étoiles ». « C’est une fête pour exaucer les voeux, et remonter le moral. » Dans ce but, 24 000 messages de l’étranger ont été envoyés à Sendaï et ont été accrochés dans trois points de la ville. Dont les messages du comité Rennes-Sendai (villes jumelles) ainsi que les quelque 150 petits mots pour grands maux récoltés à Lannion. Par l’Enssat (au Jap’and Trégor) et par l’association Viv’les langues pour laquelle Masami donne aussi des cours. « J’étais la seule représentante de la France là-bas. Beaucoup de Lannionnais ont écrit « Bon courage », « Gardez l’espoir », « Vous n’êtes pas seuls ». Une collégienne a agrémenté son message d’un dessin d’inspiration manga. Une copine sur place m’a dit que c’était encourageant de recevoir des messages de si loin. Ils ont besoin de ce soutien, de solidarité. Et bien sûr, d’argent. Parce qu’il n’y a pas que Sendai. Des petits villages côtiers, enclavés par la montagne n’arrivent même pas encore vraiment à déblayer… »
Source: Ouest France (Sylvie RIBOT)